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Les priorités en survie

25 Novembre 2011, 18:36pm

Publié par mabouillotte-et-mondoudou.over-blog.fr

http://www.davidmanise.com/textes/piorites.php
david manise
Les priorités en survie

Quand je discute avec des gens qui me demandent ce que je fais dans la vie, et que je leur explique que je suis instructeur de survie, je vois souvent leur visage s'illuminer d'un grand sourire et ils me disent « Ah ! Alors tu enseignes aux gens comment se nourrir dans la nature ! »...

Et là, juste pour piquer leur curiosité, je réponds « pas souvent ».

Même si la quête de nourriture fait bel et bien partie des choses que j'enseigne parfois à des élèves avancés, c'est très loin d'être le point sur lequel je passe le plus de temps pendant les stages. Sans doute à cause des films et des histoires de navigateurs échoués sur des îles désertes, beaucoup de gens (souvent très cultivés par ailleurs) s'imaginent que de savoir survivre, c'est d'abord et avant tout savoir trouver à manger. Or, dans la liste des priorités que nous devons gérer (je hais ce mot) dans une situation de survie, les complaintes de nos estomacs vides sont relativement peu importantes... C'est donc pour déconstruire un peu ce mythe que je prends le temps d'écrire aujourd'hui ce petit texte, qui je l'espère permettra de remettre les choses à leur place.

La règle des trois

Il y a déjà plus de 25 ans, Ron Hood — instructeur de survie et pionnier de la profession — édictait la fameuse « règle des trois », qui nous donnait une bonne idées des priorités en survie. Il disait, en gros, qu'on peut survivre : trois minutes sans air, trois heures sans abri, et trois jours sans eau.

Bien que cette fameuse règle des trois soit parfaitement valable, j'aime bien la compléter et la préciser un peu à ma sauce. J'espère que Doc Ron me pardonnera. Je considère pour ma part qu'on peut survivre :

  1. Trois secondes sans prudence : l'accident de voiture, la glissade dans une pente abrupte, la chute mal assurée, l'avalanche qui nous happe sont autant d'exemples du fait que notre survie, à la base, commence par une chose toute simple : éviter les accidents. Ça semble une évidence, mais quand je vois le nombre de victimes d'avalanches de l'hiver 2005-2006, je me dis que certaines véritées peuvent être bonnes à rappeler. D'ailleurs mon père disait toujours que les gros matous qui vivent vieux sont les gros matous prudents...
  2. Trois minutes sans oxygène dans nos centres vitaux : passé ce délai, les tissus privés d'oxygène cessent de fonctionner et se nécrosent. Un bout de peau nécrosé n'est pas une urgence vitale, mais on ne peut pas en dire autant d'un cerveau ou d'un myocarde. Et que faut-il pour acheminer de l'oxygène dans nos centres vitaux ? Des voies aériennes dégagées, une respiration qui fonctionne, une circulation sanguine efficace : ce sont les fameux ABC que doit connaître tout secouriste qui se respecte : airways, breathing, circulation.
  3. Trois heures sans abri : sous une chaleur intense ou dans un froid même relativement doux, nous mourons en quelques heures. L'immense majorité des gens qui meurent dans la nature sotn victimes de l'hypothermie ou de l'hyperthermie... ou plus souvent d'un de leurs effets secondaires (altération du jugement, perte de motricité fine, etc.).
  4. Trois jours sans eau : dans les faits, ça peut être beaucoup plus (jusqu'à 17 jours par temps frais et sans activité physique selon Xavier Maniguet), ou beaucoup moins (24h par temps très chaud et lors d'activités physiques intenses), mais ça donne une idée de grandeur. D'ailleurs, une bonne hydratation permet de résister beaucoup mieux à la chaleur ou au froid, et d'éviter énormément d'ennuis de santé, allant des problèmes de dos aux infections diverses et variées. Ce qui manque au bonheur de la plupart des gens que je connais, c'est un litre d'eau en plus dans leur corps.
  5. Trois semaines sans manger : l'états-unien moyen peut même parler de trois mois, je pense. Chaque gramme de graisse que contient notre corps stocke la modique somme de 9 kilocalories. Un kilo de graisse, c'est 9000 kilocalories, soit de quoi tenir facilement trois jours. Si on tient compte du fait que l'organisme en état de jeune (kétose) est beaucoup plus économe que l'organisme nourri, et qu'il est en mesure de trouver des calories aussi dans sa masse musculaire et les protéines présentes dans ses organes divers, je considère que les réserves énergétiques d'un adulte en santé sont de l'ordre de 150 000 kilocalories (8 kilos de graisse, soit 72 000 kCal et 20 kilos de protéines utilisables, soit 80 000 kCal). Divisons cela par deux pour être très conservateurs, et cela nous fait encore 75 000 kilocalories. À 3000 kilocalories par jour (ce qui est beaucoup pour une personne en état de jeûne, la réalité étant plus proche de 1500), cela nous laisse une réserve calorique de 25 jours. Le sujet est évidemment plus complexe que le simple décompte des calories, mais l'histoire est remplie d'histoires de jeûnes, volontaires ou forcés, dépassant le mois en durée et dont les individus sont sortis relativement indemnes. Bref : il y a des choses plus urgentes...
  6. Trois mois sans contact social : Une nécessité vitale que nous avons tendance à oublier est le contact humain. Même les plus solitaires d'entre nous ont besoin de contacts, de communication, d'échange. Mais j'ose espérer que si vous vous perdez en forêt ou en montagne un jour, on vous retrouvera avant que vous ne perdiez goût à la vie à cause de la solitude...

Donc, quand des gens prennent contact avec moi et me demandent de leur enseigner ce qui est le plus important à savoir pour survivre dans la nature, je me concentre sur les points 1, 2, 3 et 4, à savoir la prudence élémentaire, l'importance des premiers secours, la capacité à réguler sa température corporelle par tous les temps, avec ou sans équipement, et l'eau. Je trouve généralement inutile d'enseigner aux gens à reconnaître les plantes sauvages comestibles pour leur éviter de mourrir de faim, ce qui n'arrivera de toute manière jamais s'ils ne savent pas parer au plus pressé... !

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